C’est officiel, il me reste une année au baccalauréat en travail social. Et le chemin ne s’arrête pas là, car j’ai décidé de faire le saut à la maitrise, même si les études de 1er cycle sont suffisantes pour l’adhésion à l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec. J’ai déjà mon sujet de recherche et des enseignants prêts à faire office de directeurs de mémoire. Je fais le choix de poursuivre aux cycles supérieurs, car l’éducation m’apporte beaucoup humainement et personnellement. Je prends conscience que mon apprentissage est infini. Et je m’en retrouve avec une humilité décuplée face à cet univers de connaissances qui me dépasse le plus souvent. Je suis si passionnée par le travail social que j’aspire à enseigner dans le domaine que ce soit au cégep ou à l’université à plus long terme.
Mes études m’ont carrément sauvé la mise. À une certaine époque de ma vie, ça été ma bouée de sauvetage. Plus jeune, j’étais souvent première de classe. Et j’avais le plus souvent une excellente relation avec les enseignants que je croisais le temps d’une année ou d’un semestre. C’est que j’ai toujours accordé beaucoup de valeur à la parole de mes aînés. Le fait d’avoir un projet professionnel très clair tôt dans ma vie et en accord avec mes valeurs les plus fondamentales m’a permis de ne jamais sombrer dans la drogue, l’alcool, la cigarette ou tout autre mécanisme de régulation des émotions qu’on qualifie généralement de malsains et d’autodestructeurs. Le fait d’avoir souffert très tôt et intensément a été une bénédiction, car j’ai déterminé rapidement la direction que je voulais donner à ma vie et ce que je n’étais pas prête à accepter dans celle-ci. Mes études m’ont permis de m’accrocher à l’espoir d’un avenir meilleur.

En voulant devenir professeure, je tiens à redonner à la jeunesse autant que ce qu’on m’a donné. Je refuse d’être de ces adultes qui minimisent, ridiculisent ou banalisent la parole des jeunes. Parce que je me souviens de la petite Kharoll-Ann qui a souffert que certaines grandes personnes accordent peu de légitimité ou de crédibilité à ce qu’elle pouvait dire ou ressentir. Je me souviens de la frustration que j’ai ressentie quand on ne cherchait même pas à entendre ma voix, sous prétexte que je n’étais qu’une enfant et qu’on croyait d’emblée que mon âge faisait en sorte que je n’avais pas de voix assez « valable ».
Je réponds régulièrement à des questions de jeunes sur le travail social et l’intervention en ligne via Academos, un réseau social d’orientation professionnel génial et entièrement gratuit. Depuis 2013, j’ai échangé avec plus d’une centaine de jeunes. Et il y a quelque chose qui me touche dans le fait de les regarder évoluer, de les voir se poser les mêmes questions, avoir les mêmes doutes, caresser les mêmes rêves que moi et que nous tous, le plus souvent, sans même qu’ils ne s’en rendent compte. Ça me touche parce qu’ils sont moi et je suis eux. Je suis égale à eux. Car il y a quelques années, j’étais à leur place. Et par moments, je le suis toujours.
Si ce n’était pas de toutes ces personnes qui ne m’avaient pas encouragée, soutenue et écoutée, je ne ferais pas grand-chose de ma personne. En réalité, je ne ferais rien. Je n’aurais jamais trouvé la force ni le courage de foncer dans la vie. Je dois beaucoup à mes parents, mais beaucoup aussi à ces enseignants, ces allumeurs d’étincelles. Et j’en fais ma responsabilité et mon engagement d’offrir ces mêmes encouragements, ce même soutien et cette même écoute à la jeunesse d’aujourd’hui et de demain. Car peu importe ou la vie m’emmènera, je m’efforcerai toujours de me souvenir d’où je viens.