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On prend toujours un train…pour la psychoéducation!

En bonne étudiante en psychoéducation que je suis, j’ai eu à faire deux stages de formation au Baccalauréat, puis un à la Maîtrise (je suis d’ailleurs en plein dedans en ce moment!). Ces opportunités de formation « live » sont, à chaque fois, très riches en apprentissages, tant sur un milieu, une « clientèle », une équipe de travail que sur soi, en tant qu’individu et en tant que professionnel. Ces expériences permettent aussi de créer des liens significatifs avec des intervenants extraordinaires. Dans mon cas, je garde d’excellents souvenirs de mes deux stages antérieurs et j’ai pu garder des liens privilégiés avec chacune des deux psychoéducatrices qui ont grandement contribué à ma formation, à ma vision de l’intervention ainsi qu’à ma vision de moi-même comme outil de travail. Ainsi, c’est avec grand plaisir que la psychoéducatrice que j’ai côtoyée dans mon stage en milieu scolaire a accepté que je lui pose quelques questions relatives à notre belle profession encore méconnue (et pour certaines, même, inconnue!) afin d’éclaircir certaines zones obscures. Comme il y a beaucoup de questions (et donc, beaucoup de réponses) et que je veux que vous soyez bien attentif (Oh, que je suis sensible à votre bien-être!), l’entrevue sera présentée en trois temps. Donc, Temps 1, s’il-vous plaît!
Qu’est-ce qui t’a amenée à choisir la psychoéducation?
J’ai entamé le baccalauréat à 36 ans alors que mon fils était encore très jeune. J’avais envie de travailler à l’hôpital Ste-Justine, justement où mon fils était né, avec les enfants. Finalement, je n’ai jamais appliqué là-bas!
Qu’est-ce qui différencie, selon toi, la psychologie de la psychoéducation?
La psychoéducation, c’est peut-être plus concret. Ça nous permet de travailler dans le milieu de vie de la personne qu’on suit. Je considère que la psychologie, c’est de comprendre le « pourquoi du comment » alors qu’en psychoéducation, on cherche à régler le problème, la situation. L’intervention a lieu chaque fois que tu vois l’individu; chaque fois que tu la croises, tu interviens en fonction de ses difficultés. Par contre, cela ne veut pas dire qu’un psychologue ne fera pas la même chose. Je considère tout de même qu’il s’agit de deux approches différentes, puisque le psychologue rencontre la personne dans son cabinet, une heure dans la semaine et n’a, bien souvent, aucune idée de l’environnement de l’individu qu’il suit.
Malgré que la psychoéducation existe depuis plus de 50 ans, comment expliques-tu le fait que ce soit encore méconnu?
Le fait que l’Ordre professionnel (OCCOPPQ) existe depuis peu de temps (depuis 2000) peut expliquer cette situation. Aussi, nous n’avons pas notre ordre à nous (nous le partageons avec les conseillers et conseillères en orientation). Il faut aussi prendre en considération que les psychoéducateurs ne sont pas remboursables par les assurances. Ainsi, un individu qui a le choix de consulter un psychologue qu’il pourra réclamer sur ses assurances en comparaison avec un psychoéducateur qu’il paiera de sa poche, choisira sans doute la première option.
Selon toi, quelles sont les caractéristiques que devraient posséder un bon psychoéducateur?
L’aspect clinique est très important, selon moi. C’est-à-dire, que le psychoéducateur soit en mesure de comprendre les histoires des gens qu’il rencontre sans que ces derniers aient à tout dire. La distance, aussi, l’empathie sans laquelle tu ne pourras aider. Si les individus qui viennent te consulter te sentent au-dessus de tes affaires, qu’ils se sentent juger… La patience est très importante. Par exemple, inutile de ronger ton frein si tu essaies d’aider une famille depuis longtemps et qu’ils ne font rien pour s’aider eux-mêmes. Il est donc important de lâcher prise, surtout si la situation vient te chercher personnellement, par exemple dans le contexte où tu sens que l’enfant ne bénéficie pas d’assez de soutien de la part de ses parents et que tu vois toutes les conséquences que cela pourrait engendrer à plus long terme.
Pour quelles raisons crois-tu qu’il y a moins d’hommes que de femmes dans cette profession?
Dans le domaine de la relation d’aide en général, il y a moins d’hommes que de femmes. Par exemple, il y a beaucoup moins d’enseignants que d’enseignantes. Je crois aussi que culturellement parlant, ils sont moins près de leurs émotions et le fait d’être près de leurs émotions est moins valorisé que chez les femmes, par exemple.
Selon toi, est-ce que le fait qu’il y ait moins d’hommes que de femmes a un impact sur la clientèle?
Oui, car la plupart des enfants que je rencontre dans le contexte scolaire sont des garçons. Je crois que la relation avec un homme c’est important, d’autant plus que dans le milieu où je travaille (école primaire multiethnique), les mères restent souvent à la maison et les pères sont absents, car ils ont une situation d’emploi précaire, en raison de leur immigration récente.
Selon toi, pourquoi il y a plus de garçons qui te sont référés à l’école?
Bien souvent, les garçons ont davantage de problèmes extériorisés que les filles. Donc, ces garçons vont déranger. Les filles vont avoir des problèmes intériorisés qui n’attirent pas l’attention et qui ne dérangent pas les autres élèves en classe. Il ne faut pas oublier que nous sommes en contexte scolaire, dans un contexte d’apprentissage, donc. Il faut que ça fonctionne bien en classe, pour que l’enseignante puisse dispenser son enseignement, pour que les enfants apprennent. L’enfant réservé ne dérange pas les autres. Je ne trouve pas juste que ces enfants bénéficient de moins de services, mais il faut aussi comprendre la réalité scolaire, où nous n’avons pas le budget (et le temps, donc) pour intervenir auprès de tous. Par contre, nous pouvons informer les parents de nos inquiétudes à l’égard de leur enfant afin qu’ils soient plus sensibles à cela et qu’ils puissent prendre des moyens et utiliser des ressources pour remédier au problème.
…Tel un épisode trépidant de Virginie, à suivre…
-Stéphanie Deslauriers